Alors que le Front National est aux portes du pouvoir régional, ne pourrait-on pas se poser la question de la responsabilité des dirigeants de notre pays dans cette ascension qui semble de plus en plus inéluctable ?
N'aurait-t-il pas été longtemps le "jouet" des partis de gouvernement ?
Le parti de Jean-Marie Le Pen a connu ses premières victoires sous la Présidence de François Mitterrand dont on a prêté souvent l'arrière-pensée électorale de division de la Droite. Si tel a été le cas, on peut dire que c'était bien joué ! Et même au-delà peut-être de ses espérances ! Que de tiraillements à Droite pour trouver une ligne entre un Centre et une Droite dont on dit qu'une partie est de plus en plus extrême. Du reste, l'ancien Président Nicolas Sarkozy n'avait-il pas réussi à siphonner les voix du Front National lors des élections de 2007. Pour mieux les perdre 5 ans plus tard !
Les thèmes abordés par le Front National n'arrangeraient-ils pas de temps à autre les dirigeants ? Mieux, sa forte progression ne servirait-elle pas d'excuse ? Ainsi, on peut imaginer que dans les discussions budgétaires avec nos partenaires européens, nos gouvernants n'aient pas glissé cette montée d'un parti populiste qui pourrait bien s'il arrivait au pouvoir, envoyer balader l'Union européenne et son euro ! Dans la crise actuelle des migrants, on peut aussi penser que l'ombre du FN a plané dans les discussions sur la répartition des réfugiés, réduisant notre quote-part de façon notable. "Oh, nous ne pouvons pas imposer à notre population trop de réfugiés, cela risquerait de faire grimper le FN !!!"...
Le Front National ne sert-il pas depuis trop longtemps à canaliser les peurs et les colères des citoyens ? Il n'y a qu'à entendre les motivations de certains électeurs frontistes lors du premier tour des régionales, dimanche dernier. Les témoignages recueillis par les journalistes sont édifiants : attentats de Paris du 13 novembre, les impôts qui ont augmenté, les migrants... On finit par se demander si le pouvoir en place préfère voir (certes en plus petite quantité) les citoyens mettre rageusement un bulletin FN dans les urnes qu'en découdre dans les rues ; là contre le chômage, là contre le terrorisme. Avec les risques de débordements et pourquoi pas des émeutes et autres guerres civiles. Oui le Front National agirait comme un exutoire, comme l'avaient été pendant un temps les syndicats, devenus inaudibles... Du coup, nous serions arrivés aux limites de l'exercice, à force de jouer avec le feu...
Quant aux débordements racistes et xénophobes, ils ont été sanctionnés ou pas. Et il y eut fort longtemps des associations comme SOS RACISME qui réussissait à juguler le mal et à mettre de la bien-pensance. Et puis, patatras !!! A présent ces associations n'ont plus aucune écoute, quand elles ne sont pas vomies !
Reste l'antisémitisme qui a été le plus difficile à gérer et qui aurait bien pu signer l'arrêt de mort de ce parti. Et comme par magie, il y eut l'arrivée d'un ex-chevénementiste jeune et fringuant, Florian Philippot, lequel s'est évertué à faire le ménage dans les rangs des militants et de certains cadres. Du reste, la grande victime de ce nettoyage de printemps fut le père fondateur, Jean-Marie Le Pen, devenu persona non grata !
A présent, le FN qui aurait été le jouet de ces partis, s'il échappait à ceux qui voulaient sa présence, mais seulement à doses homéopathiques ?
Oui, si tel était le cas, un FN propulsé sur le devant de la scène pour servir divers intérêts, on pourrait dire que nos hommes politiques porteraient une lourde responsabilité dans tout ce qui arrive aujourd'hui. D'un vote contestataire, on est passé à un vote d'adhésion ! Bravo !!!
Car la suite n'est pas écrite...
Ce parti qui fait encore peur à bon nombre de Français va-t-il rejoindre la grande famille des partis de gouvernement et se frotter aux réaltés du terrain ? Entre les grands discours et les mains dans le cambouis, il y a un fossé, pour ne pas dire un abyme ! Ce parti pourrait bien se banaliser, faire à son tour des mécontents... La roue tourne et on pourrait voir émerger un parti encore plus radical, à l'image de ces groupes identitaires qui foisonnent ?
Mais si le parti du Front National était réellement dangereux, comme semble le suggérer le pouvoir en place, alors tout laisse à craindre que nous entrions dans l'inconnu...
Les électeurs du 2ème tour des élections régionales de dimanche prochain prendront-ils le risque ?